Christ et le cannabis

En tant que chrétien, comment penser et agir face à la légalisation récente du Cannabis au Canada?

Chaque personne au Canada est concernée par la nouvelle loi qui est entrée en vigueur récemment pour légaliser la possession et la consommation récréative du cannabis.

L’équipe pastorale de l’église Le Sentier a pensé s’exprimer sur ce sujet pertinent qui ne laisse personne indifférent. Nous avons aussi jugé utile de vous transmettre quelques ressources produites par d’autres églises ou chrétiens. Ce qui suit est une série d’affirmations et de questions sur le sujet, qui sont souvent entendues dans notre société et aussi dans notre église. Nous proposons d’y répondre d’un point de vue biblique et chrétien. Après tout, nous sommes disciples de Christ donc c’est ce que Christ en pense qui, on l’espère, sera le plus important pour nous.

Bien entendu, toutes les affirmations ou questions possibles et pertinentes sur le sujet ne sont pas répondues ici. Notre attention se portera sur la relation entre l’Évangile et la consommation personnelle du cannabis pour le chrétien. Nous n’aborderons pas les arguments pour ou contre une telle législation et ses impacts dans notre société. Il est à noter que ces commentaires ne concernent pas la consommation de cannabis prescrite par un médecin pour fin médicinale, mais seulement sa consommation récréative.

 

1. Puisque c’est maintenant légal, ce n’est plus mal d’en consommer, donc c’est bien d’en consommer.

Dans notre monde ou notre pays, la loi canadienne ne constitue pas la norme morale par laquelle une chose est bien ou mal. C’est plutôt la volonté de Dieu, la « loi » de Dieu, révélée dans les Écritures et dont l’œuvre est même écrite dans le cœur des êtres humains (voir Romains 2 : 14-15) qui est la norme morale qui nous aide à discerner le bien et le mal. Ex. : Ce n’est pas parce que la loi canadienne a décriminalisé l’avortement ou légalisé l’euthanasie que ces choses ne sont pas mal aux yeux de Dieu et qu’elles sont devenues nécessairement bonnes. Cela est aussi vrai pour la consommation de cannabis.

 

2. La Bible ne dit rien au sujet du cannabis, donc je suis libre d’en consommer.

Bien que le mot cannabis n’apparaisse pas dans la Bible, cela ne signifie pas automatiquement que Dieu ne désire pas qu’on en consomme. En effet, un argument du silence comme celui-ci (La Bible est silencieuse sur le sujet “X” donc j’ai le droit de…) n’est ni logique ni sage. Ex. : On croit à la Trinité de Dieu même si le mot “Trinité” n’apparaît pas dans la Bible, car la Bible contient plusieurs indices de cette vérité qui pointent vers la conclusion que Dieu est trois personnes en un seul Dieu. De la même manière, on verra plus bas que Dieu a quelque chose à dire au sujet du cannabis et de ses effets sur notre personne, même si le mot n’apparaît pas dans la Bible.

 

3. Consommer du cannabis est semblable à consommer de l’alcool et la Bible ne condamne pas la consommation d’alcool avec modération et, par conséquent, pas celle du cannabis avec modération. C’est l’excès qui est condamné dans la Bible.

En effet, la Bible ne condamne pas la consommation d’alcool, mais plutôt sa consommation excessive qui peut amener à l’état d’ivresse (voir Proverbes 20 .1, 23 .29-35 ou Éphésiens 5.18). Cela dit, l’accent n’est pas mis sur la substance qui conduit une personne à l’état d’ivresse ni sur la quantité de substance nécessaire pour devenir ivre. L’accent est plutôt porté sur le fait d’être enivré de vin et de ne plus être en contrôle de ses moyens. Éphésiens 5 .18 contraste être enivré de vin, qui est de la débauche (une vie de désordre), à être rempli du Saint-Esprit. L’accent est sur le quoi ou sur le qui influence notre personne. Quand on est rempli de vin — intoxiqué par le vin ou par le cannabis ou par l’héroïne, on n’exerce plus pleinement le contrôle sur nos propres facultés et ce n’est pas pour le mieux. On est alors sous l’influence de cette drogue. Par contre, quand on est rempli du Saint-Esprit, c’est ce dernier qui est « au contrôle » de notre personne alors qu’on se soumet à sa volonté. C’est le Saint-Esprit qui nous influence. Éphésiens 5. 19-6. 9 décrit ce à quoi ressemble une personne remplie du Saint-Esprit et c’est vraiment pour le mieux.

La différence entre l’alcool et le cannabis est que, tout dépendant de la constitution de notre corps, il est possible de consommer une coupe de vin ou une bière sans être intoxiqué et ressembler à la description de Prov 23. Mais, il a été démontré que quelques inspirations de la fumée d’un joint suffisent pour être intoxiqué par cette substance.1 Si l’on s’en tenait aux limites d’intoxication permises par la loi fédérale sur la conduite automobile avec les facultés affaiblies2, alors tirer une seule fois sur un joint peut être suffisant pour nous faire dépasser la limite pour le cannabis (2 nanogrammes par millilitre de sang), alors que plus d’une consommation d’alcool (une coupe de vin ou une bière) sont souvent nécessaires pour atteindre la limite pour l’alcool (80 milligrammes sur 100 millilitres de sang).

Il semble donc assez clair qu’on ne peut pas consommer du cannabis récréatif avec modération sans être intoxiqué. Même si l’excès peut être condamnable, ce que Dieu désire n’est pas simplement qu’on évite les excès, mais qu’on poursuive la sainteté et qu’on cherche à marcher par son Esprit, ce qui est incompatible avec le fait d’être intoxiqué. Marcher par l’Esprit de Dieu produira le fruit de l’Esprit dans notre vie et ce fruit inclut la maîtrise de soi et la sobriété.3 Mais, il n’est pas question de simplement établir une règle à suivre et à faire suivre aux autres. Dans notre poursuite de la sainteté, nous jouissons d’une liberté chrétienne. L’apôtre Paul dira à deux reprises dans sa lettre aux Corinthiens :

« Tout m’est permis, mais tout n’est pas utile ; tout m’est permis, mais je ne me laisserai asservir par quoi que ce soit »4 et« Tout est permis, mais tout n’est pas utile ; tout est permis, mais tout n’édifie pas ».5

À la question : Un chrétien peut-il (est-il libre de) consommer du cannabis ? La réponse doit certainement être oui ! Non pas parce que la consommation de cannabis pour fin récréative n’est pas condamnable, mais plutôt parce que “c’est pour la liberté que Christ nous a affranchis” (Galates 5:1). Un chrétien est même libre de pécher si c’est ce qu’il désire. Sinon, la liberté pour laquelle il a été affranchi n’aurait pas de sens. Il est donc libre de faire le bien ou de faire le mal. Par contre, Dieu nous avertit aussi de ne pas faire de notre liberté un prétexte pour vivre selon notre nature pécheresse et pour faire ce qui est mal aux yeux de Dieu (Galates 5:13).

Le point de l’apôtre Paul est que notre liberté chrétienne ne devrait pas être notre seule considération devant les choix que nous avons à prendre. Nous vivons dans un contexte chrétien de liberté, mais ce n’est pas suffisant de se conduire en se posant seulement la question à savoir si l’on est libre ou non de faire telle ou telle chose. Dieu nous invite à poursuivre un appel encore plus grand, plus pressant et plus noble que la seule poursuite de notre liberté : l’édification des autres, la sainteté, la santé de notre corps, l’amour de nos frères et sœurs, l’amour et la gloire de Dieu (1 Corinthiens 10:31). Déjà, la direction que nous empruntons peut en dire beaucoup sur ce que notre cœur poursuit. Au lieu d’être préoccupé à librement s’approcher le plus près possible du péché sans succomber à la tentation, Dieu nous invite plutôt à nous en détacher le plus possible alors que nous poursuivons l’attachement à Dieu.

C’est là une question de l’attitude, des désirs et des poursuites de notre cœur. Cette sensation d’euphorie, ce « high » ou ce « down » que l’on cherche selon le cas, lorsqu’on consomme du cannabis, n’est autre qu’une tentative de combler un désir ou un besoin qui peut être légitime, mais que seulement Jésus peut combler d’une manière satisfaisante par l’Évangile. Jésus est celui qui peut nous remplir de toute la plénitude de Dieu qui se trouve en lui-même (Éphésiens 1.23 et 3.19). C’est davantage à ce niveau que chacun, en se tournant vers Jésus avec l’aide du Saint-Esprit, doit user de discernement pour faire un choix qui plaît au Seigneur, plutôt que de simplement faire ce que son pasteur ou son ami lui dit de faire.

 

4. Ceux qui profiteront de la légalisation du cannabis en le consommant de manière récréative méritent ma condamnation et mon jugement et qu’on en fasse un sujet de scandale.

Il serait facile pour plusieurs chrétiens d’entre nous de se scandaliser devant la légalisation du cannabis et de condamner ou juger les chrétiens ou non-chrétiens qui choisiront d’en consommer de manière récréative. Mais, cela ne reflète pas l’esprit de l’Évangile. Nous n’avons pas été justifiés et pardonnés de nos péchés à cause de notre abstinence du cannabis, mais c’est alors que nous étions encore des pécheurs que Christ est mort pour nous et qu’il a déversé sa grâce et son amour sur nous. Dieu a pris plaisir à nous sauver alors que nous n’étions pas aimables. Le scandale n’est pas dans le fait de consommer ou non du cannabis, mais dans le fait que Christ est devenu péché pour nous, afin de nous offrir gracieusement sa justice. Ce dont les non-chrétiens et même les chrétiens qui consomment du cannabis ont le plus besoin, ce n’est ni d’arrêter de consommer du cannabis, ni notre jugement, ni notre condamnation, ni notre scandale ; mais, c’est de plus de Jésus dans leur vie.

La Bible dit que les non-chrétiens sont déjà sous la colère de Dieu, ils sont déjà jugés (Jean 3.17-18, 36). Ce dont ils ont besoin n’est pas plus de jugement, mais qu’on les aime concrètement et qu’on leur partage la grâce de Dieu en action et en parole. Nos frères et sœurs en Christ qui choisiront de consommer du cannabis n’auront pas plus besoin qu’on les juge avec un sentiment de supériorité et un regard hautain. Tous ceux qui marchent avec Jésus commencent à un endroit différent et ce que Jésus nous demande est de s’accompagner les uns les autres avec amour là où chacun est rendu, sans tenter d’enlever la paille dans l’œil de notre frère tout en ayant une poutre dans le nôtre (Matthieu 7.1-5).

Que Dieu nous donne la grâce d’aimer ceux qui nous entourent tels qu’ils sont, d’aller au-delà de nos préjugés, de nos scrupules et de notre dédain naturel même lorsque ce n’est pas notre préférence et que cela nous rende inconfortables. Jésus ne nous appelle pas au confort, mais à le suivre dans la moisson pour partager qui Il est avec un monde qui, sans le savoir, en a tellement besoin. De même, Jésus nous appelle à nous aimer les uns les autres comme lui il nous a aimés, afin que tous reconnaissent que nous sommes ses disciples (Jean 13:35). Cela signifie que par amour, nous aurons parfois même des choses difficiles à nous dire les uns aux autres. Mais, notre prière est que nous puissions le faire en reflétant la grâce et la vérité dont Jésus lui-même était rempli pendant sa vie sur la terre (Jean 1.14-17).

 

Le conseil de pasteurs de l’Église Le Sentier

 

Voici quelques ressources utiles pour aller plus loin dans la réflexion :

  • Un vidéo du pasteur Gaétan Brassard à l’Église Le Portail à Laval qui résume plusieurs des éléments mentionnés ici (moins de 14 minutes):

  • Conférence Table Ronde sur le Cannabis présentée à l’Église Chrétienne du Plateau en Outaouais au mois de mai 2018, donc quelques mois avant l’entrée en vigueur de la loi (1 h 18 min).

  1. https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1017262/conduire-sous-linfluence-du-cannabis-quen-dit-la-science. La revue British Journal of Clinical Pharmacology révèle qu’une ingestion d’environ 7 mg de THC, ou quelques 4 bouffées d’un joint produira l’intoxication. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2668079/pdf/bcp0067-0005.pdf
  2. http://www.justice.gc.ca/fra/jp-cj/rlcfa-sidl/index.html
  3. Voir Galates 5.22, 1 Thessaloniciens 5:6, 8; 1 Pierre 1:!3, 4:7, 5:8
  4. Louis Segond, La Sainte Bible(Oak Harbor, WA: Logos Research Systems, Inc., 1996), 1 Co 6:12.
  5. Louis Segond, La Sainte Bible(Oak Harbor, WA: Logos Research Systems, Inc., 1996), 1 Co 10:23.